Le Nouvel An (新年, Shinnen) au Japon est une période remplie de rituels et de traditions profondément ancrées dans la culture. C’est une fête particulièrement importante ici, bien plus que Noël qui ne signifie pas grand-chose (si ce n’est une fête “romantique” où les Japonais vont manger un KFC avec leur partenaire).

Depuis que nous sommes arrivés, c’est la première fois que nous constatons que la ville est au ralenti, que le métro est si vide et que tous les commerces ou presque sont fermés jusqu’au 4 janvier (il a fallu anticiper les courses).

Bien que nous venions d’arriver au pays, nous avons décidé de plonger dans ces coutumes, de les observer et, dans la mesure du possible, d’y participer. Voici notre expérience de cette première célébration du Nouvel An.

Le ménage de fin d’année – purification

Tout commence par une tâche vraiment pas engageante pour nous, mais vraiment significative au Japon : le ménage de fin d’année (Ōsōji, 大掃除). Cette tradition est bien plus qu’un simple nettoyage, elle symbolise l’élimination des mauvaises énergies de l’année passée pour accueillir la nouvelle année dans un environnement pur et serein. À la fin décembre, les Japonais consacrent plusieurs jours à nettoyer leurs maisons de fond en comble (il est même de tradition de commencer dès le 13 décembre). Bon, de notre côté nous avons fait un certain ménage, mais pas un ménage « de fond en comble » et nous l’avons fait le 29 décembre ce qui, visiblement, n’est pas le meilleur jour pour cela (mais c’était tout de même le ballet des aspirateurs et des tuyaux d’arrosage dans le quartier à ce moment là).

Décorer la maison : l’accueil des bons esprits

Une fois la maison propre, il est temps de préparer les décorations de nouvel, un élément central de la tradition. Nous avons donc mis un kagami mochi (鏡餅), une décoration symbolique faite de deux boules de mochi (riz gluant) empilées, souvent accompagnées d’une orange miniature (qui symbolise la longévité). Cette décoration, qui se place sur l’autel familial est une offrande à Toshigami-sama (年神様), le dieu de la nouvelle année, qui est censé visiter les maisons japonaises pour apporter bonheur, prospérité et santé pour l’année à venir.

Le kagami mochi est dans la seconde case en partant de la gauche et l’on voit bien notre mélange “Noël/Nouvel An”

En complément, nous avons installé un kadomatsu (門松), une décoration ornée de pins et de bambous, placée près de la porte d’entrée. Cette coutume, qui remonte à des siècles, sert à inviter les esprits bienveillants à entrer dans la maison pour protéger et bénir ses habitants. Nous avons également installé  un shimekazari (しめ飾り) une décoration utilisée pour marquer l’entrée de la maison durant la période du Nouvel An composée principalement de paille tressée.

Quelques jours avant le nouvel an, nous avions pu observer les maisons et temples de notre quartier se parer les uns après les autres de ces décorations de nouvel an.

Le repas du 31 décembre : des sobas pour longévité

Le 31 décembre au soir, nous avons suivi la coutume japonaise en mangeant des sobas (蕎麦), des nouilles de sarrasin en soupe. Ce plat, consommé lors du Réveillon (Ōmisoka, 大晦日), symbolise la longévité et l’élimination des malheurs de l’année passée. La texture longue et fine des sobas représente la transition vers une vie plus longue et plus prospère. Comme nous ne dormions pas à la maison mais dans un B&B avec une cuisine, nous avons emporté les éléments dans des boîtes tupperware que le Castor avait préparé d’avance pour recréer ce plat. C’était bon et réconfortant, de plus nous avions la chance d’avoir des sobas artisannaux pour le garnir ainsi que des légumes de la ferme.

Le premier lever

Le 1er janvier, beaucoup de Japonais se rendent à un endroit spécial pour voir le premier lever du soleil de l’année (Hatsuhi, 初日の出). Nous n’étions pas à la maison pour la nuit du 31 au 1er, mais avons décidé de quitter Tokyo pour pouvoir admirer ce moment magique dans de superbes conditions à Kashima. La veille, nous avions déjà vu le soleil se coucher sur un des lacs proche de la ville, à côté d’une magnifique porte Torii.

Lors du jour de l’an, c’était un spectacle très émouvant de voir sur l’immensité de l’horizon le soleil se lever lentement sur l’océan Pacifique. Nous n’avons pas eu très chaud, mais c’était loin des -30° de Winterlude à Ottawa. Mais nous étions tout de même bien contents d’avoir notre thermos de café pour nous tenir chaud. Le Lez’art a même trempé les pieds dans le Pacifique

Le 1er janvier : commencer l’année par un petit déjeuner traditionnel

Au matin du 1er janvier, il est traditionnel de manger un ozoni (お雑煮), une soupe composée de mochis (des « gâteaux de riz » que l’on réchauffe au grill) et de légumes servie dans un bouillon. Chaque région a sa propre version de l’ozoni. Chaque région a sa version, mais nous avons essayé de coller à celle de Kanto. Comme pour la soupe de sobas, nous avions plein de tupperware avec les légumes précuits et le bouillon déjà préparé. C’était délicieux.

Le temple : prière et fortune

Le début de l’année au Japon inclut également une visite au temple (寺, tera) pour accomplir le rituel de la première prière de l’année (hatsumode, 初詣). Après le lever du soleil et après notre soupe ozôni, nous avons donc rejoint une foule importante au temple de Kashima pour faire une prière, demander la protection des divinités et pour tirer une fortune (omikuji, おみくじ). La fortune nous indique si nous allons avoir une bonne ou mauvaise année, et si la fortune est mauvaise, elle est souvent attachée à un arbre  ou à un fil dans le temple pour être “emportée” et ainsi annuler les mauvaises influences. Nous avons aussi acheté deux flèches porte-bonheur (hamaya, 幅矢), qui est censée chasser les mauvais esprits et protéger la maison. Nous les avons installées dans l’entrée de la maison.

Un matsuri de Nouvel An : un festin de rues

En sortant du temple, nous avons eu la chance de tomber sur un matsuri (祭り), un festival traditionnel en plein air dont nous avions vu l’installation la veille mais où les échoppes n’étaient pas encore ouvertes. Les festivités étaient animées, avec un très grand nombre de stands de nourriture, des jeux. Nous avons profité de cette occasion pour déguster quelques spécialités. Le Lez’art a adoré ses takoyakis (たこ焼き), ces petites boules de pâte garnies de poulpe et cuites sur une plaque. De son côté, le Castor a succombé aux mitarashi dango (みたらし団子), des boules de riz gluant grillées recouvertes d’une sauce sucrée-salée, ainsi qu’à une sorte de gaufre en forme de pièce de 10 yens (10円パン)  fourrée au fromage (trop étrange mais bon) une découverte pour elle !

C’était agréable de se mêler à la foule qui célébrait, les gens semblaient tous très contents d’être là, il y avait une forme de liesse commune assez chouette.

Le repas du Nouvel An : l’Osechi-ryori

Après être rentrés chez nous le 1er au soir ; nous avons pu piocher  dans l’osechi-ryori (おせち料理), un assortiment de plats traditionnels  (normalement servis dans des boîtes compartimentées mais nous n’en avons pas). Ces plats, riches en symbolisme, sont dégustés pour célébrer la nouvelle année. Dans notre osechi, nous avions mis des sardines candied (tazukuri, 田作り), des patates douces mélangées avec des marrons (kuri kinton, 栗きんとん), du pâté de crabe rose et blanc (kamaboko かまぼこ) , des fèves de soja noires sucrées (kuromame, 黒豆), des légumes marinés comme du daikon et de la racine de lotus (renkon, 蓮根). Chaque ingrédient a sa signification : par exemple, les sardines symbolisent une récolte abondante, tandis que les fèves de soja noires représentent la santé.

Ce que nous n’avons pas fait.

Il y a aussi des traditions que nous n’avons pas suivies cette année, faute de circonstances. Par exemple, nous n’avons pas envoyé de cartes de vœux (nengajo, 年賀状), une tradition très populaire au Japon où l’on adresse des souhaits de bonne année à ses proches, collègues et amis. De même, nous n’avons pas eu à donner de l’argent aux enfants (otoshidama, お年玉), une pratique où les adultes offrent de l’argent aux enfants pour leur souhaiter prospérité.

C’était une période très sympathique à vivre,et assez dépaysante.  Il nous reste encore à amener les décorations au temple quand elles seront à brûler et à manger le kagami mochi d’ici à mi-janvier.

You may also like...

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *